« Dans ce qui suit, le réalisateur Guinéen Jacques Kolié,a accepté de nous parler de lui, de son court-métrage ‘’Les larmes de mon peuple’’ en sélection officielle au FESPACO , des difficultés du cinéma en Guinée. Il lance un appel à l’Etat et demande aux investisseurs de se tourner vers le 7ème art… » Entretien

Podiumagazine.com Bonjour ! Brièvement, pouvez-vous nous parler de votre parcours dans le cinéma.

Je m’appelle Jacques Kolié, je suis un jeune cinéaste Guinéen.

Qu’est-ce-que le cinéma représente pour vous ?

Le cinéma est un moyen pour moi de partager ma connaissance de la vie et ma culture avec d’autres personnes hors de mes frontières. C’est, également, un moyen pour moi de me défendre et dénoncer ce qui me fait mal.

Votre court-métrage ‘’Les larmes de mon peuple’’ parle des tueries de la Guinée forestière de 2012. Dites-nous, dans quel contexte vous avez tourné ce film à Dakar…

D’abord, l’idée de ce film est tirée du massacre de la nuit du 4 au 5 aout 2012 à ZOGOTA (NDLR En Guinée forestière). Le film parle de l’histoire de deux jeunes avocats à Dakar. L’un, CECE, le personnage principal, est un Guinéen et vient d’apprendre que son jeune frère a été assassiné à Zogota, son village natal. En tant qu’avocat, il veut rentrer et demander justice pour son jeune frère et tous les autres du village. Mais son amie, Binta, Sénégalaise, est enceinte, menace de se débarrasser de son enfant s’il maintient sa décision de rentrer au pays. Cécé est, donc, dans ce dilemme. Est-ce qu’il faut suivre son objectif qui est de demander justice pour les victimes de Zogota en laissant derrière lui un mort ? Ou bien mettre d’abord son enfant à l’abri?
Je vivais à Dakar quand j’ai appris les nouvelles. J’étais très choqué, mais je me suis dit que la justice guinéenne allait faire de son mieux. Car, on venait d’avoir un président démocratiquement élu et prêt à changer les choses. J’ai donc attendu très longtemps en espérant que la justice fasse quelque chose. Mais, malheureusement, personne n’en parlait, c’est ainsi j’ai décidé d’en faire un film.
A travers le film, les larmes de mon peuple, je veux que, tous ceux qui ont commandité le massacre de Zogota comprennent qu’ils ont tort. Les matériels d’une société peuvent se remplacer, mais la vie humaine quand on la perd c’est pour l’éternité. JUSTICE POUR ZOGOTA.

Il a été sélectionné dans sa catégorie au FESPACO passé. Selon vous, qu’est ce qui a fait que vous n’avez pas remporté un prix ?

Déjà, être en compétition officielle au FESPACO est un grand prix ! Le FESPACO, c’est la coupe d’Afrique du cinéma. On y retrouve de grands films réalisés avec de gros moyens. En plus, chaque jury a sa façon de voir les choses, le genre de film qui l’attire… Si mon film n’a pas remporté un prix peut être que ma démarche artistique, ou autre, n’a pas attiré l’attention des membres du jury.

En Guinée, faire un film relève du parcours du combattant. Manque de moyens financiers, manque de formation adéquate des comédiens … Vous qui évoluez au sein d’une structure professionnelle, proche du réalisateur Sénégalais Alain Gomis, quel conseil pouvez-vous prodiguer à ceux qui veulent suivre trajectoire ?

(Rires). Je conseille souvent aux jeunes qui viennent me voir d’avoir en annexe, d’autres activités leur permettant de vivre. Le cinéma en Guinée est très très malade, et on ne sait pas quand les choses vont changer. Ce qui me fait mal dans tout ça, c’est que l’état Guinéen continue de former des chômeurs sortis de l’ISAG (Institut Supérieur des Arts de Guinée). S’ils ne sont pas, encore, prêts à mettre un fond pour le soutien du cinéma, ou l’art en général, mieux vaut fermer cet institut. De 2003 à 2019, l’ISAG a produit assez de chômeurs et je pense que ça suffit.

Que pensez-vous du cinéma qui se fait en Guinée ?

Moi, personnellement, j’encourage tous ceux qui essaient. Ce cinéma dit cinéma populaire ( NDLR Les vidéos en langues nationales de Guinée sans gros budgets et sans moyens techniques adéquats), c’est comme ça que celui du Nigéria a commencé. Le seul problème en Guinée, c’est la formation et le financement. Le jour que ces jeunes qui essaient trouveront des appuis auprès de l’Etat ou des institutions en Guinée et un peu de formation, je vous garantis qu’ils feront des miracles. Tellement ils sont talentueux à l’état brut.

Un message pour nos lecteurs

Le cinéma est une véritable industrie qui génère beaucoup d’emplois. Il est, encore, un bon moyen de faire de la politique. Je prie l’Etat de faire face au cinéma. J’invite, également, ceux qui ont des moyens financiers d’investir dans ce domaine. Le cinéma est un moyen de se faire connaitre hors de plusieurs frontières et créer de bonnes relations. Et ces relations peuvent déboucher sur beaucoup d’avantages.
Propos recueillis par Marco Ibrahim
Rédaction Podium Magazine
marcoibrahima@yahoo.fr

21 COMMENTAIRES

  1. Vraiment c’est bien dit mon frère. Il nous faut un secours. Connaissant l’histoire du cinéma Guinéen, il suffit d’un petit coup de main pour la renaissance se confirme

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